Mathieu Halm, Directeur de la Rétrocession et de la Stratégie chez CCR Re nous fait part de ses réflexions sur différents points de l’actualité des Insurance-Linked Securities (ILS), dont il fait une sélection trimestrielle. La titrisation des risques d’assurance et de réassurance est un sujet encore méconnu mais passionnant de cette industrie.
Nous défendons la thèse que la Place de Paris a intérêt à se positionner sur les transactions privées afin d’attirer des sponsors qui souhaitent aborder pour la première fois le marché des ILS.
Une plateforme, utilisant un Fonds Commun de Titrisation comme support, ainsi que l’a créée CCR Re sous le nom de 157 Re, offre un accès au marché des capitaux. Ce type de structure transforme des risques d’assurance et les propose directement à des investisseurs désireux de chercher des relais de croissance décorrélés des actifs traditionnels. À ce titre, le format du Fonds Commun de Titrisation est vraisemblablement plus propice à l’émission de deals privés, pour des sponsors se positionnant dans la durée.
Il est certain que ce type de transaction privée impose une contrainte, pour le moins importante, car elle coupe le sponsor de toute une frange des investisseurs ILS.
Néanmoins, sa principale force est de permettre à des acteurs de taille relativement modeste de créer leur propre plateforme d’accès au marché des capitaux. Et ce, avec l’avantage d’ouvrir le capot du véhicule et de véritablement mettre les mains dans le moteur afin de gagner en expertise. Mieux encore, de gagner en indépendance et surtout de nouer des partenariats stratégiques et de long terme, pour accompagner leur croissance.
L’expertise, développée dans la création de sa propre plateforme permettra à l’émetteur de passer ensuite plus facilement le cap de transactions de plus grande envergure tel un Cat Bond 144A compatible. Cela peut également être l’occasion de s’orienter vers d’autres juridictions selon les besoins spécifiques de l’émetteur (les Bermudes, l’Irlande ou bien encore Singapour pour ne citer que ces trois-là).
Nous pouvons cependant penser qu’un acteur cherchant à travailler dans les ILS sur le long terme a tout intérêt à jouer la carte de la proximité en utilisant le ressort culturel, et ce spécialement quand les besoins en capital ne se chiffrent pas en milliards de dollars.
Le FCT répond parfaitement à ce type de besoin par sa déclinaison en compartiments. Il peut largement séduire les sponsors français mais également européens en quête d’un outil efficace qui pourra les accompagner dans leur croissance sur le long terme, tout en maitrisant les différents aspects.
Il en est un que nous avons tendance à sous-estimer dans notre industrie largement globalisée, la maîtrise culturelle des concepts. Nous pouvons, en effet, largement considérer comme acquis qu’il est indéniable que la plupart des sponsors potentiels, non anglo-saxons, sont composés de professionnels ayant la capacité à créer un SPV en Irlande, à Londres ou bien encore aux Bermudes dans le cadre de l’émission d’un Cat Bond ou d’un sidecar, et ce même chez les acteurs de petite taille. Il est presque tout aussi indéniable de considérer que ces mêmes acteurs de taille modeste, préfèreraient commencer à structurer un ILS dans un environnement (cadre juridique, régulateur, société de service…) dont ils sont plus naturellement familiers. Et cela tout particulièrement si le sponsor souhaite avoir la maîtrise technique de sa plateforme, sans être dépendant d’un prestataire de service pour la reconduction de son véhicule.
La démocratisation des ILS passe donc par l’émergence de nouvelles juridictions qui peuvent être un marchepied pour un certain type de sponsor qui s’ignore et qui pourrait cependant accéder au marché des ILS.
À en croire Swiss Re, le durcissement des taux de la (ré)assurance devrait se poursuivre en 2022. Ceci part d’un constat simple, le resserrement de la capacité étant le résultat non pas d’une diminution du capital disponible mais plutôt d’une appétence au risque revue à la baisse.
Dans sa note, le réassureur helvétique précise que la réduction de l’appétence au risque des acteurs est alimentée par les doutes qui pèsent sur la modélisation des risques dans environnement de marché pour le moins incertain.
En tout état de cause, force est de constater suite au renouvellement en Floride que le marché n’est pas dur mais que l’appétit des réassureurs pour les tranches basses s’est fortement comprimé.
Il sera intéressant de voir pour le renouvellement du 1er janvier 2022 comment se positionnent les différents acteurs. D’ici là tant de choses peuvent se passer.